Ce mardi 12 novembre 2024, les élèves de 2MRC1 ont rencontré au CDI une dizaine de migrants récemment arrivés sur Vesoul, venus témoigner auprès d’eux de leurs parcours. Cette rencontre a été proposée par Christelle Georges, de l’Association Accompagnement Migration Intégration (A.A.M.I 70) et préparée par Zhen, leur enseignant de français, également présents.
Dans le cadre de notre projet « Ensemble dans la diversité », ce moment d’échange et de solidarité a permis aux lycéens de compléter leurs connaissances sur les migrations (étudiées à travers l’exposition Halte aux préjugés sur l’immigration et le livre Eux, c’est nous), mais surtout d’entendre des récits de vie incarnés, nourris par un beau dialogue réciproque.
Autour de la table, élèves comme adultes se sont présentés par leurs prénoms, avant que d’entendre le récit de migrations souvent justifiées, comme Tom le suppose, par des situations compliquées dans les pays d’origine.
Ainsi Zmari a raconté son parcours d’un an et demi, qui l’a fait quitter l’Afghanistan pour rejoindre la France en traversant 10 pays à pied (Iran, Turquie, Grèce, Macédoine, Serbie, Bosnie, Croatie, Slovénie, Italie, Suisse). Impressionnés, les élèves ont finalement trouvé cette durée courte pour tant de kilomètres, mais Zmari, muni de son seul sac de couchage et de sa maitrise de multiples langues (pachto, dari, urdu, iranien, hindi et anglais) a eu le temps de souffrir de faim, de froid et de fatigue. Christelle Georges précise que cette fuite se fait en toute illégalité et dans la peur, au risque d’arrestations qui obligent à recourir à des passeurs et à affronter la rudesse des montagnes.
C’est notamment le cas de Nima, parti du Tibet à pied vers le Népal en traversant l’Himalaya (chaîne de montagne culminant à 8000 m d’altitude) avant que de rejoindre le Qatar puis l’Italie (en avion) et enfin la France en bus. Agriculteur, Nima a dû quitter son pays colonisé par la Chine, dont l’armée infiltrée maltraite violemment certains bouddhistes et tibétains.
Quand on arrive en France pour fuir un danger dans son pays et qu’on peut le prouver, un statut de réfugié politique est accordé pour 10 ans, à condition de signer un contrat d’intégration républicaine qui implique l’apprentissage de la langue française (entre 100 et 600h obligatoires). Cela permet ensuite de s’intégrer, administrativement, socialement et professionnellement.
Mais il arrive qu’un migrant ne puisse prouver le danger auquel il a tenté d’échapper. Dans ce cas, il peut seulement bénéficier d’une protection subsidiaire pendant 4 ans. En tout état de cause, il sera très compliqué pour lui de retourner dans son pays d’origine où son départ a souvent été très mal vu, pays avec lequel il a souvent dû rompre tout contact.
Certains, comme Souleiman, commerçant dans son pays, arrivé en 2023 à cause de la guerre civile au Soudan, venu depuis la Syrie, puis le Liban et la Turquie, ont pu quitter leur pays avec quelques membres de leur famille, mais c’est très rare. La plupart des migrants font des parcours individuels, même si sur le trajet des regroupements se font, à la faveur de filières clandestines souvent coûteuses. Ainsi, Mohammed, soudanais, est arrivé en petit bateau gonflable en Italie depuis la Tunisie, après être arrivé de Lybie à pied. A 25 sur l’embarcation, la traversée a été très risquée. Il est ensuite arrivé par la montagne en France, à Briançon. Il s’est retrouvé à Vesoul suite à l’affectation par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides qui lui a accordé sa demande d’asile. Si sa demande avait été déboutée, il aurait dû repartir seul ou faire un recours, si possible avec un avocat, ce qui suppose d’avoir de l’argent…
A la question posée par Léo sur ce qui avait été le plus dur à gérer dans ces parcours, Fazalrahman témoigne avec émotion. Viticulteur en Afghanistan, il a parcouru de multiples pays (Iran, Turquie, Bulgarie, Serbie, Hongrie, Autriche, Suisse, France) pendant 6 à 8 mois. Pendant son trajet, il a subi de nombreuses violences : en Iran, la police, sans aucun respect des droits humains, a tiré sur eux comme sur des animaux à la chasse. En Bulgarie, des chiens d’attaque se sont jetés sur lui. S’il n’avait pas versé la somme de 1000 euros demandée (racket), peut-être ne serait-il plus vivant aujourd’hui…
Malgré les traumatismes subis, tous expriment la gratitude de se sentir aujourd’hui en sécurité et accompagnés (ils vivent avec une aide minimale de l’Office Française de l’immigration). Tous souhaitent pouvoir travailler rapidement, même si leurs diplômes ne seront pas toujours reconnus. Arrivés depuis peu, Zmari, Souleiman, Mohammed, Nima, Fazalrahman et leurs compagnons se concentrent actuellement sur l’apprentissage de notre langue. Cette rencontre fut l’occasion de la pratiquer dans de riches échanges. Avec émotion, les élèves ont spontanément souhaité applaudir nos invités. Nous remercions tous les participants pour la qualité de leur échange et écoute réciproques.
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